Les recouvrements sont aussi appelés covertattoos. Depuis que j’ai débuté dans le métier, j’ai réalisé de nombreux recouvrements.
Il existe deux catégories principales de recouvrements: le recouvrement d’anciens tatouages et le recouvrement de cicatrices et/ou brûlures. Dans les deux cas, il est toujours nécessaire de faire plus grand que la zone à recouvrir stricto sensu.
Les recouvrements d’anciens tatouages
Mon histoire personnelle avec le tatouage a très tôt été marquée par le recouvrement, en tant que cliente au début des années 90. J’ai malheureusement eu affaire à un tatoueur qui a totalement raté ce que je lui avais demandé, puis je suis passée sous les aiguilles d’un autre tatoueur qui a recouvert le massacre, mais qui en continuant le motif a lui aussi dérapé. J’ai fui les studios de tatouage pendant près de 15 ans, avec un mépris absolu pour les tatoueurs, je dois l’avouer, avant de trouver finalement une tatoueuse qui a repris avec talent les ratages du second, mais a aussi fini par improviser de manière beaucoup moins heureuse la suite de la pièce dans mon dos. J’ai totalement mis fin à cette triste aventure à ce moment-là.
Puis je suis devenue tatoueuse moi-même, forte de ces expériences malheureuses mais formatrices, et surtout de mon expérience graphique due à mes études d’art. Ainsi je suis à même de comprendre le désarroi des clients qui sont tombés entre de mauvaises mains. Je sais ce qui est faisable ou pas. Heureusement il n’y a pas que des drames de cet ordre, il y a aussi tout simplement des tatouages qui ont plus ou moins mal vieillis et qu’il faut rafraîchir ou parfois recouvrir. Les anciens tatouages dont l’encre a terni sont plus simples à reprendre que des pièces récentes à l’encre bien marquée. En effet, on ne peut recouvrir le noir que par du noir. Les couleurs de noir ancien qui ont terni, les gris, et les différentes couleurs sont recouvrables par du noir, des gris, des violets et des bleus plus ou moins foncés. Les couleurs chaudes sont recouvrables par des couleurs chaudes et froides, des gris et du noir. Pour simplifier je dirais qu’on ne peut recouvrir une teinte que par une teinte au moins aussi foncée, et de préférence froide. Les couleurs claires ne permettent pas le recouvrement. Il faut se méfier de l’évolution dans le temps de certains tatouages récents qui montrent des motifs à l’encre blanche sur des fonds totalement noirs qui ont certainement servi à un recouvrement. Le blanc s’affadit vite dans le temps, juste après cicatrisation, il est déjà beaucoup moins intense et devient plus transparent, et il y a de fortes chances qu’on finisse par ne plus voir ou à peine distinguer le graphisme blanc au final. Comme je le disais dans un autre article, les photos postées sur le net sont souvent des photos de tatouage prises le jour de la réalisation.
Cela m’amène à parler des « blackout » ou « total black » qui sont de grands aplats de noir. J’en porte d’ailleurs un sur mon bras. Il arrive que la seule solution pour masquer un tatouage laid soit de mettre un surface noire intégrale. On peut parfois réserver quelques espaces où il sera possible de mettre de petits motifs clairs, comme des fleurs, des pétales, etc… En effet, il a des cas où trouver un motif beau et harmonieux qui permette de masquer un ratage n’est simplement pas possible. D’où les « blackwork ».
Dans tous les cas, je demande au client de simplement réfléchir au nouveau motif, c’est ensuite moi qui me charge de réaliser la composition adéquate.
Les recouvrements de cicatrices et brûlures
Le tatouage est une belle façon de masquer et de faire oublier des cicatrices, même étendues, même en relief, et aussi des brûlures . Ici, on est libre des couleurs et de la composition du motif, car même si cicatrices et brûlures présentent souvent des différences de pigmentations, cela ne nous contraint pas à opter pour des teintes nécessairement sombres.
Il faut veiller à ce que les cicatrices soient assez anciennes ( elles ne doivent plus être rouges, et on conseille en général d’attendre au moins un an ), et les brûlures totalement guéries. Même de la peau de grand brûlé, qui a été greffée peut être tatouée. J’ai déjà réalisé de nombreuses fois ce type de tatouage qui permet de rendre une belle image de soi à la personne qui a été accidentée ou opérée.
Je me suis rendue compte qu’il y a un réel bénéfice psychologique, en plus du bénéfice esthétique, et on m’a souvent dit: « tu m’as rendu le sourire, tu as changé ma vie ». J’ai toujours été extrêmement touchée par la joie dans le regard des gens qui voient leur tatouage fraîchement réalisé et les traces de leurs souffrances disparues de leur peau, et je pense que cette part de mon métier est ce qu’il y a de plus beau ! Ce regard positif et nouveau que les gens peuvent poser enfin sur eux-même change aussi ma vie et me donne aussi le sourire et la joie ! Et je les en remercie infiniment !